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Cartographies de nouveaux mondes 
E
xplorer la création artistique

Pilotage sur mesure par Sarah Di Bella - historienne des spectacles et dramaturg [1] .

L’invitation dramaturgique consiste à s’ouvrir au vaste champ de la mémoire matérielle en tressant l’esprit du « braconnage transdisciplinaire » à la « philosophie du pistage ». Cela permet de suivre la trace des formes qui colonisent son imaginaire (oui, le tien !), de remettre en question les cartes de la grande distribution et de signaler les tensions qu’elles invisibilisent ou qu’elles neutralisent. En proposer d’autres, cela peut être la finalité à mettre en forme, via d’autres images agissantes, antagonistes des figures qui condensent une domination ou une tétanisation. Renverser ce rapport de force avec les instruments de ce pouvoir sémantique signifie faire un nouveau destin aux formes marginalisées ou qui, au contraire, impressionnent nos espaces culturels. 

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photo © César Vayssié

La carte[2] est le medium entre un territoire et un individu qui souhaite s’y relationner. Une carte sélectionne, cache ou met en exergue ceci ou cela d’un même espace. Elle le résume en image et en imagine graphiquement les rapports. Puisque collectivement utilisée, elle entretient l’imaginaire d’un territoire qui lui préexiste. Le pouvoir qu’exerce une carte, ça nous intéresse ! Depuis la conception d’une « image de la pensée », nous avancerons par étapes, jusqu’à la construction d’une « carte de la vision[3] », point de départ d’une recherche artistique[4] à la teneur critique, donc engagée.

Le terme allemand de dramaturg permet de rattacher plus immédiatement notre méthode à une branche de l’histoire de la dramaturgie qui a été définie comme la « dramaturgie de l’expérience », où le dramaturg participe au « système des présences » en développant des micro-dramaturgies de situations et d’action, en définissant et en fertilisant par cela même le terrain de la rencontre entre le théâtre et la société. Voir Claudio Meldolesi et Renata Molinari, Il lavoro del dramaturg, Ubulibri, 2007. Les modules d’accompagnement conçus par Sarah Di Bella associent une démarche franchement sensible et intuitive à de l’exigence intellectuelle pleinement au service de chaque singularité artistique.

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 « La carte n’est pas un objet mais une fonction », Ch. Jacob, L’empire des cartes, 1992, p. 29. La carte, œuvre graphique de spatialisation, se situe au croisement de l’iconic turn et du spatial turn, et invite par définition à un investissement imaginaire. Par « images de la pensée » nous entendons les « figures créées pour apprivoiser ce que le langage est impuissant à saisir : le surgissement de la pensée dans son effervescence secrète » (M.-H. Caraës et N. Marchand-Zanartu, Images de pensée, 2019) ; alors qu’une « carte de la vision » trace un pas de plus dans la réflexion autour des rapports mis en jeu, puis signale la naissance de ce qu’on nomme le projet. Chaque artiste sera accompagné dans l’élaboration de ce dispositif visuel pour trouver son propre système de signes, la matrice singulière et malléable de la recherche à venir.

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Pour que le projet puisse aboutir à une création, la carte initiale devra se mesurer à un territoire, donc à un imaginaire collectif déjà à l’œuvre, pour en signaler des impasses, marquer des invisibles, déplier de nouveaux chemins, étendre des barrages, proposer des réactualisations ou des déviations salutaires. Travailler au cœur de l’imaginaire collectif implique la mise en branle d’une recherche sensible et critique permettant de repérer et de sélectionner les marqueurs des narrations dominantes via une recherche sur les figures – composition de signes qui font geste ou de gestes qui font signe – dont il est possible de constituer une iconographie, reconnaissables par rapport à une mémoire, anthropologiquement déterminée. Par une recherche artistique et critique sur les figures de l’imaginaire, les tensions entre carte et territoire seront formulées et perçues à la hauteur de leur complexité et de leur potentiel créatif.

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Le travail produit dans les deux premières étapes permet de constituer un dossier solide et de largement exercer l’esprit critique du porteur du projet. L’écriture pourra alors se nourrir autant que nécessaire de retours à la recherche, et la transmission des enjeux aux collaborateurs et aux potentiels partenaires sera d’autant plus fluide et limpide. Tant que les arts vivants pourront contribuer à définir le monde, chaque création devra composer avec les tensions entre la carte et le territoire des imaginaires dominants, entre la vision qu’elle propose et le regard le plus extérieur, pour informer ce dernier de son potentiel métamorphique.

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